Dans le bidonville de Bonnier, à Montpellier, "la chaleur accroît la misère"

"La chaleur rend notre vie plus dure encore": à Montpellier, depuis la fin juin, canicule et températures élevées font souffrir Claudia, jeune mère de famille, et la centaine d'habitants, dont de nombreux enfants en bas âge, du bidonville de Bonnier.

Pieds nus dans la poussière du terrain coincé entre une autoroute et le parc du Château Bonnier de la Mosson, une "folie" du XVIIIe siècle, Diego, un des quatre enfants de Claudia, ne supporte aucun vêtement et ne sait plus comment se rafraîchir. Le garçonnet de 4 ans se verse de l'eau sur la tête ou fait des acrobaties pour plonger dans une petite bassine. A côté de lui, deux fillettes s'arrosent mutuellement avec un pistolet à eau vert fluo.

Si l'Hérault ne fait pas partie mardi des zones en alerte canicule, la température y a atteint 39°C lundi et le département détient le record historique français de température, avec 46°C enregistrés à Vérargues le 28 juin. Ce jour-là, un homme était mort d'un arrêt cardiaque dans un autre bidonville de Montpellier. Officiellement cependant, les autorités n'établissent pas encore de lien entre ce décès et la vague de chaleur, dans l'attente d'une étude nationale ultérieure.

"Ces fortes chaleurs augmentent notre misère: les enfants comme les adultes dorment mal, ont des fièvres et sont malades", souligne Claudia, âgée de 26 ans, dont le mari travaille en intérim dans le secteur du bâtiment. "Nous n'avons pas l'eau courante et on a besoin de beaucoup plus d'eau pour les douches, la lessive qu'on fait à la main dans des bassines et aussi d'eau en bouteilles pour boire", ajoute la jeune femme brune.

"Un seul point d'eau existe à l'entrée du terrain", souligne Clara Pichon, médiatrice de la Cimade qui suit ces familles Roms originaires de Roumanie depuis plusieurs années. "Ils doivent venir chercher l'eau avec des bidons et ont peur de tomber malades s'ils la boivent: ils vont donc acheter des packs d'eau au supermarché". Difficile dans ces conditions de pouvoir observer les consignes de prévention face aux canicules.

- Chaleur "intenable" -

Sur le terrain écrasé de chaleur, hommes, femmes et enfants font un va-et-vient incessant en plein soleil vers le point d'eau, avec des poussettes chargées de bidons.

A Bonnier, une douzaine de familles originaires de la ville roumaine de Barbulesti, à 60 km au nord-est de Bucarest, vivent depuis des années dans des cabanes en bois et des caravanes. Fortement discriminées dans leur pays d'origine, elles disent "voir leur avenir en France", où les plus jeunes sont nés, tout en effectuant de fréquents allers-retours entre les deux pays.

Les familles sont regroupées sous les auvents en bois des cabanes, parfois équipés d'un ventilateur tournant grâce à un groupe électrogène. A l'intérieur des cabanes et des caravanes mal isolées, la chaleur est "intenable", explique Miguel, un jeune homme d'une vingtaine d'années qui s'affaire à ramasser et brûler des ordures, dégageant une odeur âcre.

Sa jeune femme Sara tient dans ses bras son bébé, Anaïs, dont le visage et la peau sont marqués de larges piqûres rouges. "Avec la chaleur, il y a beaucoup de moustiques et aussi plus de souris et de rats que d'habitude sur le terrain", explique-t-elle avec une petite grimace de dégoût.

Brenda, elle, attend son quatrième enfant pour novembre et avoue être "très fatiguée par la chaleur, surtout quand il faut aller à pied aux visites médicales". Comme elle, beaucoup de jeunes femmes du bidonville rêvent d'un appartement "pour avoir une vie moins rude" et "assurer l'avenir" de leurs enfants.

"Ce n'est pas la canicule qui tue, c'est la misère !", avaient souligné la Fondation Abbé-Pierre, la Cimade et Médecins du Monde après le décès enregistré le 28 juin. Quelque 800 personnes vivent en bidonvilles à Montpellier, 600 en squats et plusieurs centaines dans la rue.

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