Défaillances en matière de qualité d'accueil, fausses déclarations, anomalies financières, refus de coopérer : l'inspection générale des affaires sociales (Igas) épingle dans un rapport publié lundi la gestion du groupe de crèches privées la Maison bleue.
Le groupe, qui a fait l'objet d'investigations de mars à décembre 2024, a refusé de transmettre certains éléments et documents à la mission, indique l'Igas dans son rapport d'une centaine de pages. Mais les éléments recueillis et analysés "suffisent à démontrer d'importantes carences dans la gestion financière et comptable du groupe".
L'inspection pointe du doigt des "pratiques, parfois intentionnelles, de transmission d'informations erronées à l'administration (communes, CAF) ayant systématiquement pour objet de maximiser les versements de fonds publics".
Certains constats "pourraient relever du champ pénal, notamment l'opération d'externalisation de l'immobilier du groupe ainsi que la perception de PSU (prestation de service unique, NDLR) par des établissements ayant déclaré avoir cessé leur activité", ajoute l'Igas.
S'agissant de la qualité de l'accueil, le rapport évoque des "manquements fréquents" au respect des règles d'encadrement et de qualification en crèche, carences relevées "dans 49% des rapports de visite réalisés par les services de la protection maternelle et infantile (PMI) en 2023".
La mission, qui précise s'être rendue dans dix-sept crèches au cours de son enquête, estime que "la qualité de l'accueil dans les crèches repose sur un niveau d'engagement élevé des professionnels, qui vise à compenser, sans y parvenir systématiquement et au risque de l'épuisement, les difficultés liées à l'optimisation des ressources humaines".
"Des non-conformités à la règlementation ont été constatées (fausses déclarations, perception de prestations par des moyens frauduleux...), "qui conduisent à saisir le procureur de la République au titre de l'article 40 du code de procédure pénale", indique l'Igas.
Dans un communiqué, le groupe La Maison Bleue "prend acte de la saisine du procureur sur la base de l'article 40", et se dit prêt à "apporter toutes les réponses nécessaires devant les autorités compétentes".
Le groupe "récuse certaines allégations du rapport", et regrette "l'absence de prise en compte" d'une "grande majorité des réponses détaillées adressées dans la phase de contradictoire", poursuit le communiqué.
"Il y a des erreurs administratives, mais je récuse toute intention de fraude", a indiqué à l'AFP Claire Laot, directrice générale du groupe.
Le groupe est en train de mettre en place "un plan de transformation de 76 mesures", "pour répondre à l'intégralité des points soulevés par l'IGAS", plan qui est "suivi mensuellement avec le cabinet de la ministre des Solidarités Catherine Vautrin", a-t-elle précisé.
Fondé en 2004 en Ile-de-France, le groupe revendique l'accueil de 20.000 enfants au sein de son réseau de 600 crèches, qui s'appuie sur 6.000 collaborateurs et fait état d'un chiffre d'affaires annuel d'environ 300 millions d'euros.
L'image du secteur des crèches privées - dominé par Babilou, Grandir (les Petits Chaperons rouges), People&Baby et La Maison bleue - a été passablement ébranlée par la mort d'une fillette de 11 mois dans une crèche People&Baby à Lyon en juin 2022.
Quelques mois plus tard, deux livres-enquêtes ("Le prix du berceau" et "Babyzness") avaient enfoncé le clou, en jetant une lumière crue sur le mode de fonctionnement de certaines structures privées à but lucratif.