Après le mandat de Donald Trump aux "conséquences négatives" pour la lutte contre le réchauffement climatique, Laurent Fabius appelle la communauté internationale à renouer avec "l'esprit de Paris" pour agir au plus vite, dans un entretien accordé à l'AFP.
Avant le sommet anniversaire sur le climat qui se tient samedi, cinq ans après la COP21 qui a débouché sur un pacte climatique historique, son président confie ses "espoirs", alors que "l'environnement international climatique est en train de changer".
Battu il y a un mois lors de l'élection présidentielle américaine, le président Donald Trump, qui avait annoncé le retrait de son pays de l'accord de Paris dès sa première année à la Maison-Blanche, doit remettre en janvier son mandat au démocrate Joe Biden qui a promis de le réintégrer.
"J'ai eu l'occasion de dire que la position de M. Trump était régressive", rappelle M. Fabius. "Elle a été extrêmement négative parce qu'elle a empêché un certain nombre de progrès, mais surtout pour le contexte mondial".
"Certains pays qui avaient signé l'accord de Paris, mais qui n'étaient pas enthousiastes (...), ont réagi en disant que si la première puissance mondiale n'était pas sur cette ligne, ils ne voyaient pas pourquoi ils feraient un effort", souligne-t-il.
A ses yeux, l'arrivée à la Maison blanche de M. Biden est "importante". "Les positions qu'il a prises sont l'inverse de celles de son prédécesseur: réintégration de l'accord de Paris, encouragement aux énergies nouvelles, création d'emplois verts...", rappelle-t-il.
"Mais cela ne va pas être facile", reconnaît M. Fabius, évoquant notamment les incertitudes sur la majorité qui dominera le Sénat américain, les "interrogations sur les décisions que pourrait prendre ou pas la Cour suprême", ou encore "les résistances" de certains groupes pétroliers.
- Besoin de compromis
Même avec le retour des Etats-Unis dans la lutte contre le réchauffement climatique, M. Fabius estime que la partie n'est pas gagnée pour autant: "Un pays ne peut imposer sa loi aux autres. Il faut entraîner tout le monde avec soi pour avancer. Il faut convaincre, il faut un esprit de compromis, créer la confiance".
C'est pour cette raison qu'il en appelle à "l'esprit de Paris" et au multilatéralisme qui avait permis d'atteindre un accord il y a cinq ans, en obtenant le soutien de tous.
"Il faut que ceux qui poussent à continuer pour aller plus loin entraînent aussi les autres. Il faut écouter tout le monde (et) trouver un compromis ambitieux car s'il est au rabais nous n'aurons pas d'avancée suffisante".
Pour le président de la COP21, il convient désormais "d'aller plus loin et aller vite". "L'accord de Paris a permis une certaine amélioration mais elle n'est pas suffisante par rapport aux objectifs que nous nous sommes fixés".
Pour "ramener la focale à 2030", M. Fabius plaide notamment pour des plans de relance de l'économie, durement frappée cette année par le coronavirus, qui soient "verts et pas bruns".
Partant du constat que "la mobilisation est moindre pour lutter contre le dérèglement climatique que contre la Covid, alors qu'il est plus grave à terme", M. Fabius reconnaît qu'il aurait été nécessaire d'insister beaucoup plus "sur les conséquences y compris à court terme du dérèglement climatique pour les populations et les régions les plus précaires".
"Il faut insister sur cet aspect", assure-t-il, refusant de se présenter comme un optimiste ou un pessimiste, mais plutôt comme un "volontariste". "Il n'y a pas de vaccin contre le réchauffement climatique, mais il y a un antidote: c'est l'application intégrale et mondiale de l'accord de Paris", assure-t-il.