Claude Alphandéry, résistant de la première heure et grand monsieur de l'économie sociale et solidaire, est décédé "paisiblement" à 101 ans, a appris mardi l'AFP auprès de sa familles, une nouvelle qui a suscité de nombreux hommages politiques.
Claude Alphandéry est décédé des suites de "multiples maladies" lundi soir, vers 22H00, a indiqué à l'AFP Marc Alphandéry, l'un de ses deux fils.
Sur la fin de sa vie, il était "très affaibli sur le plan physique", mais jusqu'il y a une semaine "toujours très actif intellectuellement", a-t-il précisé, "Il réfléchissait même à la façon dont on pouvait encore se mobiliser contre la montée de l'extrémisme en France et de la barbarie dans le monde!".
Né à Paris le 27 novembre 1922, d'un père trésorier-payeur général et d'une mère présidente d'une société immobilière, le jeune Claude Alphandéry avait à peine 20 ans lorsqu'il a épousé la résistance lyonnaise, abandonnant les bancs confortables de sa khâgne pour le maquis. Il s'y est distingué et est devenu en 1944 président du comité de Libération de la Drôme. Une expérience qui l'a marqué à jamais.
Soutien de François Mitterrand en 1974 et bienfaiteur du PS, il a apporté ses convictions dans les politiques publiques et s'est investi dans ce qui deviendra l'économie sociale et solidaire (ESS), persuadé qu'elle constitue la solution face au libéralisme et au capitalisme effrénés.
"Les combats qu'il a menés pendant la Seconde Guerre mondiale dans les maquis puis son engagement professionnel dans l'ESS montrent une continuité dans son engagement personnel", a estimé son fils Marc.
Le décès du résistant a déclenché une vague d'hommages du monde politique.
Olivier Faure, le premier secrétaire du PS, a fait part sur le réseau social X de sa "grande tristesse". "Centenaire il avait encore la ferveur militante de ses 20 ans et continuait de suivre avec intérêt et disons le, parfois inquiétude les débats à gauche", a-t-il souligné.
"M. Alphandery, vous avez marqué notre pays, par votre altruisme, votre magnanimité, votre générosité", a affirmé Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation, "L'économie sociale et solidaire est en deuil et vous pleure".
- "Combativité" et "engagements forts"-
La tête de liste écologiste au européennes Marie Toussaint a elle tenu à rendre un "hommage" à ce "résistant de toujours contre les injustices". Elle a salué "une vie entière d'engagements forts pour l'entraide coopérative et la Résistance au système capitaliste".
Claude Alphandéry avait fondé France Active en 1988, association d'aide à la création d'entreprises engagées, puis le Labo de l'ESS en 2010 pour promouvoir cette économie sociale et solidaire au niveau national et européen.
"Nous avions fini par le croire immortel ! Son mot d'ordre +vivre et résister+ était tellement puissant (...) que nous refusions l'idée de sa mort", a salué Hugues Sibille, président du Labo de l'ESS et proche ami de M. Alphandéry.
"Jusqu'au bout il voulut se battre contre les risques majeurs de nos sociétés dont il avait une conscience aiguë, croyant sur son lit d'hôpital à un +prodige de résistance+", a-t-il ajouté, saluant la "combativité" qu'il laisse en héritage.
Marc Alphandéry a salué le "goût de la vie, son l'enthousiasme, l'optimisme invétéré à transformer les choses, la curiosité, l'humanisme" de son père, dont témoignait d'après lui sa tribune publiée le 4 mars dans le Nouvel Obs.
Dans ce texte poignant écrit alors qu'il était "hospitalisé", le grand résistant appelait ses lecteurs à "tout faire (...) pour empêcher une nouvelle nuit noire de l'humanité", inquiet "pour l'Etat de droit, pour les libertés publiques, pour la paix" face à "l'arrivée au pouvoir de régimes autoritaires et populistes".
"Mon tout dernier appel, avec les forces qui me restent, c'est de vous inciter à tout mettre en oeuvre pour que ce qui a motivé ma vie, le combat contre le fascisme, contre la barbarie et pour les droits humains, soit à nouveau mobilisé dans une grande alliance humaniste des forces de vie", y a-t-il écrit.
Ses funérailles, ouvertes au public, auront lieu mercredi 3 avril à 14H00 au cimetière parisien de Montparnasse.