Bure: les opposants bravent l'interdiction de manifester

Les opposants au projet d'enfouissement des déchets nucléaires à Bure (Meuse) ont annoncé vendredi leur intention de passer outre l'interdiction de manifester décrétée par la préfecture qui redoute de nouveaux débordements.

Il y a une semaine, pas de moins de 500 gendarmes avaient été requis pour l'évacuation manu militari d'une quinzaine d'occupants du bois Lejuc, épicentre de la contestation tandis que leurs bivouacs et barricades étaient détruits à l'aide de bulldozers.

Devant la perspective de nouveaux "troubles graves à l'ordre public", la préfète de la Meuse Muriel Nguyen a pris dans la nuit de jeudi à vendredi un arrêté interdisant "toute manifestion".

"Plus de 700 opposants sont attendus", dit-elle dans l'arrêté. "Un nombre important" d'entre eux présentent un "profil extrêmement inquiétant", ajoute-t-elle, interrogée par l'AFP. "Cette manifestation n'a pas été déclarée (...) et le parcours autorisé proposé par l'Etat a été rejeté" par les militants, a-t-elle précisé.

"Il existe un fort risque d'affrontements avec les forces de l'ordre stationnées aux abords du bois", étant donné "le caractère jusqu'au-boutiste de certains des opposants" et "le mot d'ordre visant à réinvestir" la zone, a encore fait valoir la préfète de la Meuse.

"On est scandalisé. C'est un arrêté liberticide", a répliqué Juliette Geoffroy, porte-parole du Collectif contre l'enfouissement des déchets radioactifs (Cedra), ajoutant que l'appel au rassemblement lancé par les opposants était "maintenu".

Prévu de longue date, il doit être selon eux l'occasion d'"une rencontre inter-comités de soutien et de lutte".

La préfète Muriel Nguyen a prévu un dispositif de maintien de l'ordre "évolutif" et "suffisant pour contenir un risque avéré de débordement et de violence" qu'elle s'est cependant refusée à détailler.

"S'il y a une tentative physique de réinfiltration du bois et de réoccupation par la construction d'un bâtiment, il y aura une réponse. Mais le dispositif ne viendra pas gêner un rassemblement pacifique", a-t-elle cependant dit.

Le bâtiment visé est une "vigie" que les adversaires du projet entendent construire "aux abords de la forêt" samedi après-midi. Le dispositif rappellerait celui érigé en leur temps par les zadistes de Notre-Dame-des-Landes.

"Nous construirons, sur un terrain privé qu'on nous prête pour l'occasion. On ne nous empêchera pas de le faire", assure Juliette Geoffroy. Selon le programme du rassemblement diffusé sur internet, un "départ collectif vers la forêt" est également prévu dans l'après-midi.

-"Une hypocrisie totale"-

Les matinées du week-end seront consacrées à des tables rondes et des rencontres entre opposants à Mandres-en-Barrois, commune voisine du bois.

"Il y a une hypocrisie totale, car ils demandent plus de consultation et on nous empêche de nous réunir pour discuter", proteste Sylvain, habitant de la commune.

Le 23 février, au lendemain de l'évacuation du site, les associations d'opposants, qui devaient rencontrer le secrétaire d'Etat à la Transition écologique, Sébastien Lecornu, avaient boycotté la réunion.

"Je suis à la disposition de tous les opposants légaux pour améliorer sans cesse le projet et les outils de concertation associés", a-t-il cependant tweeté vendredi.

Le site de Bure a été choisi en 1998 pour accueillir un laboratoire souterrain qui doit préparer l'enfouissement des déchets nucléaires les plus radioactifs ou à vie longue produits par les centrales du parc de centrales françaises.

Quant au bois Lejuc et ses abords, un terrain qui s'étend sur 221 hectares, il a été retenu par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) pour l'installation des cheminées d'aération du laboratoire.

L'agence doit aussi réaliser des forages exploratoires dans la forêt afin de récolter des données en vue du dépôt d'une demande d'autorisation formelle de création du site, prévue pour 2019, les forages étant rendus impossibles par l'occupation du bois.

Depuis le lancement du projet, les manifestations d'opposants se sont multipliées tandis que des recours judiciaires étaient intentés pour tenter d'empêcher le démarrage des travaux. En août dernier, des affrontements avaient fait six blessés parmi les opposants et deux parmi les gendarmes.

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