"La situation des déficits et de la dette est impossible à éluder": le Premier ministre François Bayrou a ouvert le débat mardi avec les représentants des collectivités sur le budget 2026, à l'occasion d'une "conférence financière des territoires".
Ce rendez-vous réunissait à l'Hôtel de Roquelaure les associations d'élus, des parlementaires ainsi que plusieurs ministres dont ceux de l'Economie, des Comptes publics, de l'Aménagement du territoire et du Travail/Solidarités.
"La situation des déficits et de la dette est impossible à éluder. On ne peut pas faire semblant", a souligné François Bayrou tout en invitant "à vaincre un dernier pli de la pensée", qui consisterait à dire "c'est de la faute des collectivités" ou "c'est de la faute de l'Etat".
Dans une présentation de 37 pages intitulée "Situation 2024 et perspectives", le gouvernement rappelle que la France dépense depuis 20 ans plus qu'elle n'engrange de recettes, et que son endettement "massif" caracole à plus de 3.300 milliards d'euros contre 880 milliards en 2000.
De leur côté, les collectivités territoriales dont l'Association des maires de France (AMF) n'ont de cesse de souligner que leur dette est "stable depuis 30 ans, à 9% du PIB".
Par strate, la situation financière des communes en 2024 est jugée "solide", quoique "en léger retrait par rapport à 2023" tandis que celle des départements continue de "se dégrader significativement" depuis deux ans. Celle des régions est "stable" mais "fragile".
"Cette réunion a permis de partager un état des lieux des finances des collectivités", a indiqué Matignon dans un communiqué. Un optimisme que ne partagent pas les participants.
"Il y a eu de longues interventions, donc il y a eu des échanges, mais qui n'ont pas abouti", a indiqué André Laignel, premier vice-président délégué de l'AMF et président du comité des finances locales.
- "Injonctions contradictoires" -
"Sur les causes, nous ne sommes pas d'accord, parce que nous disons que lorsqu'on supprime la taxe d'habitation, l'État contribue à ce déficit, et sur les solutions, il n'y a pas de consensus", a abondé Jean-François Debat, président délégué de Villes de France, l'association des villes moyennes.
Le gouvernement a annoncé la mise en place de groupes de travail sur des thématiques "conjointement définies avec les collectivités" et qui se réuniront jusqu'à "fin juin".
"Le premier groupe qu'on nous proposait, c'était que nous définissions nous-mêmes si on se coupait un bras ou une jambe, donc on a refusé", a ironisé André Laignel.
Selon Matignon, les échanges auront notamment pour objectif de "dégager des perspectives pluriannuelles qui répondent à la volonté des élus d'avoir une meilleure visibilité à long terme" et de "poursuivre les réflexions sur les modalités de la contribution des collectivités (...) qui sont à concevoir conjointement".
Parmi les pistes d'économies, le gouvernement estime que trois leviers sont "à la main des collectivités", comme des mutualisations de services entre communes et intercommunalités ou une "maîtrise de la masse salariale" à la faveur des prochains départs à la retraite.
L'Etat pourrait lui procéder à des "simplifications" en suspendant l'édiction de nouvelles normes ou en évaluant "les modalités d'évolution des dépenses de solidarité nouvelles".
"L'ensemble des collectivités territoriales ont dit leur absence de marge de manoeuvre, leurs difficultés face aux injonctions contradictoires de l'État, qui à la fois nous demande de moins dépenser, mais qui, semaine après semaine, nous impose de nouvelles tâches", a souligné André Laignel, disant attendre "les propositions de l'Etat".
"Il y a une volonté de nous écouter. Serons-nous entendus ? Je ne suis pas sûr", a averti Jean-François Debat, jugeant "impossible de parvenir à 40 milliards d'euros d'économies uniquement par des économies budgétaires".
Une deuxième "conférence financière des territoires" est prévue en juillet avant le verdict final sur les choix budgétaires promis d'ici le 14 juillet par François Bayrou.
Lundi, ce dernier a également lancé à Marseille une grande conférence sur le financement des infrastructures de transports qui doit durer deux mois.