Bons conseils et réseautage: les entrepreneuses s'attaquent au "syndrome de l'imposteur"

"Faut pas hésiter à se lancer"! Devant une vingtaine de femmes réunies à la mairie de Chelles (Seine-et-Marne), qui ont déjà créé leur entreprise ou sont en passe de le faire, Nadège Hammoudi l'affirme avec force: l'entrepreneuriat est aussi une affaire de femmes.

En ce matin pluvieux de septembre, la représentante du réseau d'accompagnement à l'entrepreneuriat Initiative Ile-de-France est venue encourager les participantes à s'inscrire à la 14e édition du concours "Créatrices d'Avenir".

La compétition met chaque année aux prises des créatrices d'entreprises franciliennes, dont les projets sont soumis à un jury spécialisé (chefs d'entreprises, banques, membres de réseaux d'accompagnement...).

Les lauréates décrochent un chèque de quelques milliers d'euros et peuvent se faire accompagner dans leur projet entrepreneurial, par exemple via des séances de coaching.

Un soutien bienvenu alors que seulement 40% des entreprises ont été créées par des femmes en 2022, selon l'Insee.

Assise au premier rang, devant les larges fenêtres de la salle municipale, Liza Sans apprécie de "voir des têtes (qu'elle) connaît" à l'occasion de cette réunion.

"C'est toujours agréable, parce qu'on est très seule", témoigne celle qui a fondé son entreprise de secrétaires indépendantes il y a deux ans, pour soulager entrepreneurs et artisans de leur "charge administrative".

Liza Sans espère ainsi être "accompagnée" par Initiative France pour accroître la visibilité de son entreprise et élargir sa clientèle.

"Aujourd'hui mon activité est très répandue, on est très nombreuses. Ce qui est vraiment difficile pour moi, c'est d'apporter une différence", témoigne-t-elle.

Autant que des informations sur le concours Créatrices d'Avenir, les entrepreneuses sont venues chercher à Chelles le soutien de leurs pairs.

"Pour moi cet évènement, c'est l'occasion de se rencontrer", raconte Emmanuelle Vaillant sous le regard de pierre du buste de Marianne.

Graphiste et illustratrice, elle a démarré son activité depuis cinq ans et aide ses clients (entreprises, associations...) à définir leur "identité visuelle".

Malgré son expérience, il lui arrive parfois de douter encore: "Est-ce que je suis capable d'être à mon compte et d'apprendre plein de métiers?", comme ceux de comptable ou de communicante, des compétences indispensables quand on travaille seule, s'interroge-t-elle.

- "Moins d'autocensure" -

Quelques sièges plus loin, Christelle Oswald confesse avoir surtout besoin d'accompagnement financier.

Après avoir travaillé comme salariée dans le milieu de la haute joaillerie, elle veut "révolutionner ce secteur" en lançant sa propre ligne de bijoux "éthiques".

Mais "j'ai du mal à me projeter, à anticiper. Quand on me dit +comment tu te vois dans 2 ans?+, je bloque", confie-t-elle sur fond de sonneries aiguës qui appellent les usagers de la mairie au guichet.

Coraline Damme, architecte d'intérieur qui s'est formée en ligne pour se mettre à son compte après dix ans passés à exercer dans le secteur du commerce, juge "qu'en tant que femme, avoir confiance en soi n'est pas quelque chose d'inné."

"On a tendance à s'excuser d'être là", regrette-t-elle, avouant avoir ressenti le "syndrome de l'imposteur" quand elle a pris son indépendance professionnelle.

Le recours aux services d'une coach lui a finalement fait prendre conscience qu'elle "avait (sa) place" dans le monde de l'entrepreneuriat.

Un exemple révélateur d'une plus grande assurance des femmes qui se lancent dans l'aventure, assure Nadège Hammoudi. "La société évolue, il y a moins d'autocensure", se réjouit-elle.

Adjointe au maire de Chelles et cadre du secteur bancaire, Laëtitia Millet souligne que "le parcours du porteur de projet est compliqué, parfois un peu long, parfois semé d'embûches, mais c'est une liberté et une richesse inestimables que d'être son propre patron."

Un discours qui a persuadé quatre participantes à la réunion d'entamer les démarches d'inscription au concours Créatrices d'Avenir, se félicite Nadège Hammoudi.

Depuis le lancement de cette compétition en 2011, 4.000 entrepreneuses se sont portées candidates et 80 projets ont été récompensés, selon Initiative Ile-de-France.