"On a besoin de reconnaissance!": le cri de détresse des agriculteurs

"On ne veut pas embêter les automobilistes, juste crier notre détresse". Sur des ronds-points et le périphérique toulousains, plusieurs dizaines d'agriculteurs ont tenu mardi des barrages filtrants pour dénoncer un "agribashing" allant croissant selon eux.

Musique entrainante, saucisses au barbecue, bières et températures estivales... L'ambiance est bon enfant, mais l'amertume est tangible en cette journée de mobilisation nationale, menée, sous le slogan, "France, veux-tu encore de tes paysans ?", par le syndicat majoritaire FNSEA et les Jeunes agriculteurs.

"Aujourd'hui, ce n'est pas un blocage total, on est là pour lancer un avertissement et montrer à l'Etat qu'on peut monter en puissance dans les jours à venir", affirme à l'AFP Christian Mazas, président de la FDSEA 31, présent en début de matinée sur un rond-point du sud de Toulouse.

La raison de leur colère ? Le sentiment de décalage entre, d'un côté les normes "draconiennes" imposées aux agriculteurs français, et de l'autre les accords commerciaux signés avec des pays ne "jouant pas avec les mêmes règles".

L'adoption envisagée des zones de non-traitement aux pesticides a été la goutte de trop: "toutes ces surfaces perdues vont devoir être compensées par de l'importation", s'agace Elodie Doumeng, secrétaire générale des Jeunes agriculteurs de Haute-Garonne.

- "Stigmatisés" -

"C'est inadmissible, on est en train de laisser de la merde entrer dans nos assiettes tout en faisant croire que c'est nous les pollueurs", s'emporte aussi Luc Mesbah, secrétaire général adjoint de la FDSEA 31.

Mais ce qui mobilise surtout, c'est l'impression d'être "stigmatisés": "Comment voulez-vous que les jeunes soient incités à faire ce métier quand tous les jours on se fait insulter au coin de nos champs ? Quand tous les jours des ONG s'en prennent à nos exploitations ?", déplore M. Mazas.

Il estime "urgent de rétablir une communication avec les riverains et les consommateurs".

"Ca fait 22 ans que je suis dans le métier et je n'ai jamais vu ça", lui fait écho M. Mesbah, disant ne pas comprendre les raisons de ce désamour des Français envers leurs agriculteurs.

Vers midi, les différents groupes rassemblés sur les ronds-points convergent avec leurs tracteurs sur le périphérique toulousain, déversant paille, fumier et pneus sur la route, mais veillant à laisser un passage aux automobilistes.

"Les gens sont de plus en plus conscients de leur alimentation, ils ont peur pour leur santé, et c'est très bien", se félicite Mme Doumeng, éleveuse d'ovins de 29 ans et "fière d'être la septième génération" d'agriculteurs dans sa famille.

- "Nous faire confiance" -

Mais "on a l'impression que les gens ne connaissent plus notre métier. Nous aussi on est sensibles à la biodiversité, on a compris que l'abus de certaines pratiques dans le passé n'étaient pas forcément bon pour le sol, les plantes et notre santé".

Elle met en avant la volonté de la nouvelle génération d'agriculteurs de développer une "agriculture autre". "Mais à un moment, il va falloir que les gens nous fassent confiance, on a besoin de reconnaissance !", lance-t-elle.

Plus loin, Christophe Campourcy, un céréalier de 52 ans, se tient près des grillades qui fument, une bière à la main.

"Moi je fais du bio, par conviction, mais tout le monde n'en a pas les capacités et je me reconnais entièrement dans la détresse de mes collègues qui manifestent aujourd'hui", indique-t-il.

"On sent que les gens ne nous supportent plus", dit-il décontenancé. "On déplace du matériel en campagne et on se fait agresser, on moissonne et on nous fait comprendre qu'on dérange".

"Je ne comprends pas... C'est un beau métier, on fait manger ce pays quand même", lâche-t-il.

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