Les nuisances sonores et l'emploi figurent en tête des préoccupations sur l'avenir de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle (CDG), a annoncé jeudi son gestionnaire, promettant d'y répondre tout en adaptant l'infrastructure à une croissance du trafic "modérée", refusée par des ONG.
Le Groupe ADP a mené d'avril à juillet, de sa propre initiative, une concertation avec les riverains, élus, associations, entreprises et autres parties concernées, recueillant plus de 20.000 avis sur ses plans pour le premier aéroport français aux horizons 2035 et 2050.
Présenté en mars, ce projet vise une "adaptation" graduelle des infrastructures à la progression de la demande, estimée entre 1% et 1,5% par an. Ce rythme, inférieur à ce qui était envisagé avant la pandémie de Covid-19, pourrait se traduire par 105 millions de passagers en 2050 contre 70 millions l'année dernière.
Début 2021, le gouvernement avait renoncé au projet controversé de Terminal 4 qui aurait fait passer la capacité d'accueil de CDG à 120 millions de passagers dès 2037. La nouvelle approche est "plus progressive et plus sobre", promet ADP.
- Couvre-feu -
Aujourd'hui, "on est face à une double attente à l'égard de l'aéroport: on veut moins de bruit et on veut plus d'emplois", a expliqué jeudi la directrice générale déléguée du Groupe ADP, Justine Coutard, en présentant les résultats de la concertation.
L'entreprise, détenue à 50,6% par l'État, a promis une baisse de 30% "de la population considérée comme soumise à une forte gêne" sonore en journée d'ici à 2035 et de 54% en 2050, par rapport à 2019.
De nuit, pour une plateforme qui n'est pas soumise à couvre-feu contrairement à Orly et accueille d'importantes rotations de fret, ADP vise une chute de 32% du nombre de personnes touchées par des perturbations de sommeil d'ici à 2035, et de 63% en 2050.
ADP veut notamment "amplifier le mécanisme de modulation des redevances aéroportuaires" qui pénalise les avions les plus anciens et bruyants, et continuer à travailler avec la Direction générale de l'aviation civile sur l'optimisation des trajectoires.
Le groupe estime que l'accroissement de l'activité de CDG suscitera la création de 10.000 emplois d'ici à 2035, en sus de 30.000 remplacements de départs à la retraite. Quelque 20.000 emplois supplémentaires seraient créés entre 2035 et 2050.
La concertation a fait apparaître la demande de voir ces emplois bénéficier "aux jeunes des territoires" à proximité de CDG, aux confins de la Seine-Saint-Denis, du Val-d'Oise et de la Seine-et-Marne, a remarqué Mme Coutard, en promettant là aussi des mesures dans ce sens.
- Davantage de pollution -
Alors que seul un passager sur trois accède aujourd'hui à CDG ou le quitte en transport en commun, ADP ambitionne de voir cette part "passer à 58% en 2035" grâce à de nouvelles offres, que ce soit le CDG Express, ligne ferroviaire directe prévue depuis la Gare de l'Est en mars 2027, le TER Roissy-Picardie dès l'année prochaine, ou encore en 2030 la ligne 17 du métro du Grand Paris.
Résultat, la fréquentation de la gare TGV de l'aéroport, actuellement de 15 millions de passagers par an, devrait doubler d'ici à 2030 et tripler d'ici à 2050, selon le gestionnaire, qui promet aussi une neutralité carbone des activités au sol en 2035, grâce en particulier à des équipements solaires et géothermiques.
Pas de quoi amadouer l'Association de défense contre les nuisances aériennes (Advocnar), jadis en pointe dans la lutte contre le projet du Terminal 4, qui a regretté que "sous un nouveau nom et un nouveau format, la logique reste la même: augmenter le trafic aérien".
Cette association, dans un communiqué commun avec le réseau d'ONG "Rester sur terre", partisan d'une limitation du trafic aérien, a jugé que "cette extension aurait des conséquences sanitaires, climatiques et sociales graves. Elle entraînerait une hausse massive du nombre de vols, donc davantage de nuisances pour les riverains (...), de pollution de l'air, de gaz à effet de serre", réclamant son "abandon immédiat".
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