Enfin! Les montagnards vont pouvoir retrouver les joies des longues courses en montagne, avec la réouverture des refuges à partir du 2 juin, même si celle-ci sera progressive et devra répondre à un strict protocole sanitaire.
Après une saison amputée de son printemps, "c'est une bonne nouvelle pour les gardiens, qui sont impatients et pour les pratiquants", se félicite Emily Cardoso, directrice du Syndicat national des gardiens de refuges et gites d'étape (SNGRGE).
"C'est une bouffée d'air frais pour tout le monde, mais la tâche n'est pas aisée", ajoute Mme Cardoso, dont le syndicat compte 215 adhérents au sein des quelque 350 refuges français.
Mais, pour ne pas créer de faux espoirs, propriétaires et gardiens le précisent bien: la plupart des refuges ne seront pas ouverts le 2 juin.
Les premiers commenceront à être prêts "vers le 5-6 juin" pour les refuges de bord de route du Parc national de la Vanoise, selon sa directrice Eva Eliacar, qui espère ensuite ouvrir ceux d'altitude le 15 juin.
Du côté de la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM), qui a perdu "environ 1 million d'euros de chiffre d'affaires" avec le confinement, on vise "entre le 10 et le 15 juin" pour "les refuges les plus simples - à savoir les plus grands et les plus récents", avance Niels Martin, directeur adjoint.
Il cite ainsi en Haute-Savoie, les refuges de la voie normale du Mont-Blanc (Tête Rousse et le Goûter); en Savoie, le col de la Vanoise et la Dent Parrachée; dans les Hautes-Alpes, le glacier Blanc et les Ecrins; dans le Mercantour, le refuge des Merveilles et le refuge de Nice; dans les Pyrénées, celui des Oulettes de Gaube.
D'ici là, des aménagements vont devoir être réalisés dans ces lieux où règne habituellement une réelle promiscuité. Opérations rendues complexes par le fait que pas un refuge ne ressemble à un autre.
- "contre-nature" -
Un protocole sanitaire général a été élaboré et validé, sous la houlette de la secrétaire d'Etat Emmanuelle Wargon, montagnarde à ses heures, et du Conseil national de la montagne, dirigé par le député des Hautes-Alpes Joël Giraud. Ce document a été transmis le week-end dernier aux 30 préfets concernés, de la Savoie (coordinateur) au Jura en passant par la Corse et la Réunion.
Lavage des mains, port du masque, gestion des déplacements dans les bâtiments, diminution du nombre de couchages dans les dortoirs, installation de tentes de bivouac, décalage des heures de repas et espacement des tables, nettoyage des locaux, matériel de protection pour le gardiens et ses aides...: tout y est mentionné.
"C'est un timing très serré, mais on est dans les temps, et la fréquentation n'est pas maximale début juin", rassure Mme Eliacar.
Côté gardiens, "il y a un peu de stress", reconnaît Mme Cardoso, car le protocole doit être décliné dans chaque refuge en lien avec le propriétaire, puis signé par la mairie et enfin transmis en préfecture.
"Le second tour des municipales peut compliquer le processus. Si c'est une nouvelle équipe, ce n'est pas confortable. Et les préfectures sont débordées dans cette période...", souligne la représentante des gardiens.
Les randonneurs et alpinistes vont aussi être mis à contribution: les réservations deviennent obligatoires et sont assorties d'une "charte d'engagement individuel" à signer.
"On prenait bien ses crampons, sa corde et son eau pour faire une course. Là, c'est la même démarche: on amène son masque, son gel et son sac de couchage", plaisante Mme Cardoso.
Pour M. Martin, "ce que nous impose le Covid-19 est un peu contre-nature: les refuges, c'est la rencontre et la convivialité. Mais on va le faire car c'est important pour la sécurité de tous".
D'autant qu'"une montage sans refuge, c'est embêtant", résume Joël Giraud. Ils sont en effet "un maillon de toute une économie touristique (...), des guides aux producteurs locaux qui les ravitaillent", abonde Emily Cardoso.