Automobile: les grandes questions du plan de relance attendu en France

Le président Emmanuel Macron doit annoncer mardi un plan pour relancer le marché automobile français paralysé par la crise du coronavirus, des mesures qui doivent réveiller la demande en urgence mais dont l'impact sur l'emploi feront débat.

- Pourquoi un tel plan ?

La pandémie de Covid-19 a provoqué un arrêt brutal du commerce automobile. Le marché français des voitures neuves s'est effondré de plus de 70% en mars et de près de 90% en avril. L'activité des usines et des concessions a redémarré en mai, cependant les experts craignent une reprise lente, avec des consommateurs réticents face à l'achat automobile, qui constitue leur deuxième plus grosse dépense après le logement. Sur l'année, les ventes pourraient chuter de 20% en Europe et 30% en France, un pays parmi les plus touchés.

Le secteur a déjà beaucoup souffert de la crise du diesel et doit consentir des investissements très lourds dans les nouvelles technologies (véhicules électriques et connectés).

Première victime de la crise, Renault a été contraint de solliciter un prêt de 5 milliards d'euros garanti par l'Etat et s'apprête à annoncer des fermetures de sites. L'équipementier Novares, qui emploie 1.350 personnes en France, a été placé en redressement judiciaire.

Or, l'automobile représente 400.000 emplois industriels directs et 900.000 avec les services (concessionnaires, garages, auto-école, etc.). De 40.000 à 50.000 postes sont menacés, uniquement dans les services, et 30% des entreprises risquent la faillite, selon le Conseil national des professions de l'automobile (CNPA).

- Quelles mesures ?

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a indiqué que le plan allait "relancer la demande", surtout celle "de véhicules propres, qui émettent le moins de CO2". Il faut "renouveler le parc automobile français" et "donner un vrai coup de pouce au véhicule électrique."

Le bonus écologique, prime à l'achat d'une voiture électrique qui est actuellement de 6.000 euros pour les particuliers, pourrait être augmenté.

Idem pour la prime à la conversion, subvention à l'achat d'une automobile récente en échange de la mise au rebut d'un vieux véhicule, qui profite aux ménages modestes. Ce dispositif aurait pour la filière l'intérêt de stimuler aussi l'achat de véhicules d'occasion et de motorisations thermiques récentes, qui constituent l'essentiel du marché.

Les concessionnaires croulent actuellement sous les stocks de véhicules (essentiellement essence et diesel) qui représentent 4 mois de vente et 10 milliards d'euros de trésorerie et qu'ils doivent écouler d'urgence.

Le plan comprendra aussi un soutien à l'offre. Il faut "soutenir les PME, leur permettre de se digitaliser, de se robotiser", a expliqué M. Le Maire.

- Des débats inévitables

Le renforcement de la prime à la conversion est un chiffon rouge pour les ONG environnementales. "Le gouvernement doit clairement écarter l'option d'une énième prime à la casse pour les véhicules thermiques, y compris les plus récents", ont prévenu Greenpeace, la Fondation Nicolas Hulot et le Réseau Action Climat, dans un communiqué commun. Ces organisations réclament aussi "un coup d'arrêt à la logique du tout-SUV", ces 4x4 urbains, plus lourds et plus énergivores, dont les ventes ont explosé ces dernières années, et veulent une remise en cause globale de la place de la voiture individuelle dans les déplacements.

L'efficacité économique des mesures nécessitera une coordination européenne. Renault écoule seulement 17% de ses volumes en France et PSA 24%. Leur marché est européen et mondial. Des aides françaises profiteront aussi aux constructeurs étrangers qui occupent près de la moitié du marché national.

Enfin, les plus grosses ventes françaises, les citadines Peugeot 208 et Renault Clio, ne sont plus fabriquées en France mais dans des pays à bas coûts. Le gouvernement réclame donc des engagements pour localiser en France les emplois liés aux véhicules électriques. "Il y a un engagement que doit prendre Renault: c'est d'être actionnaire de l'alliance pour les batteries électriques", a déclaré lundi M. Le Maire. Le projet est aujourd'hui porté par PSA (Peugeot, Citroën, Opel) et le spécialiste des batteries Saft, filiale de Total.

Après la crise financière de 2008-2009, les contreparties sur l'emploi exigées par l'Etat n'avaient pas empêché une vague massive de délocalisations. Pour éviter un nouvel échec, des mesures de renforcement de la compétitivité sont à l'étude pour septembre.

aro/ak/dlm

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