Assurance chômage: l'Unédic prévoit un impact massif de la réforme sur les chômeurs indemnisés

La réforme de l'assurance chômage aurait, la première année de son application, un impact négatif sur l'indemnisation d'un entrant sur deux par rapport aux règles antérieures, selon une étude de l'Unédic publiée mardi qui confirme les craintes des syndicats.

Lors de la première année de mise en oeuvre globale de la réforme (avril 2020-mars 2021), "parmi les 2,6 millions d'allocataires qui auraient ouvert un droit" avec l'ancien système, "9% n'ouvriront pas de droits" avec les nouvelles règles et 41% subiraient une baisse de leur allocation journalière, une ouverture de droits retardée ou une durée de droits plus courte.

La réforme, décidée par décret cet été par l'exécutif après l'échec d'une négociation entre partenaires sociaux, durcit les conditions d'ouverture de droits: il faudra au 1er novembre avoir travaillé six mois lors des 24 derniers mois (contre quatre mois sur 28 aujourd'hui).

Le seuil de "rechargement", qui permet de prolonger son indemnisation, passera à six mois de travail contre un seul. Cela concernera potentiellement plusieurs centaines de milliers de demandeurs d'emploi actuels, à qui Pôle emploi a décidé d'envoyer deux millions de courriers pour les informer de ce changement...

Autre mesure à fort impact, la modification, à partir d'avril 2020, du calcul de l'indemnisation, que l'exécutif jugeait trop favorables aux personnes travaillant de manière discontinue.

Quelque 850.000 nouveaux entrants, qui avaient des périodes non travaillées entre deux contrats, auront une allocation mensuelle plus faible de 22% en moyenne (de 905 à 708 euros). Elle baissera même de 50% (de 868 à 431 euros) pour 190.000 personnes qui travaillaient entre un quart et un mi-temps.

"Ce sont ceux déjà fragilisés, qui ne travaillent qu'un petit peu, qui vont être les plus touchés", s'est indignée Marylise Léon (CFDT). "C'est encore pire que prévu", a réagi FO.

Certes, ces chômeurs verront la durée maximale d'indemnisation s'allonger (de 12 à 18 mois en moyenne), ce qui fait dire au gouvernement que leur capital de droits reste intact.

Mais les demandeurs n'utilisent pas leur capital en intégralité (10 mois en moyenne), ce qui explique que cette mesure à elle seule permette 1,1 milliard d'économies à partir de 2021.

- "Effets de comportement" -

En outre, avec la baisse de l'indemnisation, certains demandeurs d'emploi ne pourront plus bénéficier du cumul travail-allocation.

Fortement critiquée par la CFE-CGC, la dégressivité de 30% au bout de six mois pour les allocataires ayant perçu une rémunération mensuelle supérieure à 4.500 euros brut, aura moins d'impact. Les premiers touchés le seront en mai et il y en aura "1.000 à 2.000" nouveaux chaque mois à partir de fin 2020.

Cette étude conforte les syndicats dans leur opposition à la réforme. Comme la CFE-CGC, FO et Solidaires, la CGT va déposer un recours devant le conseil d'Etat contre des décrets "régressifs".

La présidente de l'Unedic, Patricia Ferrand (CFDT), va transmettre cette étude au Parlement car "c'est un enjeu démocratique d'avoir une étude d'impact qui éclaire le débat public".

L'exécutif avait d'avance critiqué une première version des travaux de l'Unédic en estimant qu'elle ne prenait pas en compte les "effets de comportement" de la réforme, c'est-à-dire l'incitation à reprendre plus rapidement un travail.

Ces effets sont "difficiles à prévoir ex ante" car "ils sont multiples", a répondu Pierre Cavard, directeur général par intérim à l'Unédic. En outre, ils sont "assez lents" car les chômeurs "ne se rendent compte que progressivement de la réforme quand leur compte en banque est touché". Enfin, il faudra "prendre en compte l'effet report vers d'autres dispositifs (prime d'activité, RSA)".

L'étude tire aussi les conséquences financières de la réforme. Les économies, en ligne avec les prévisions du gouvernement (3,4 milliards sur 2020-2021), permettront un retour à un excédent plus ample en 2021. Le solde net sera cependant plus faible car la réforme ouvre aussi des droits pour certains démissionnaires et les travailleurs indépendants.

Côté entreprises, elle prévoit l'instauration d'un "bonus-malus" sur les cotisations pour lutter contre les contrats courts dans certains secteurs et la taxation des CDD d'usage, des contrats ultra-flexibles.

Enfin, Pôle emploi va assurer un renforcement significatif de l'accompagnement des chômeurs, grâce notamment aux 1.000 postes en plus créés ces trois prochaines années.

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