ArcelorMittal demande "une application rapide" du plan européen pour l'acier avant de sortir le carnet de chèques

Arcelor Mittal, qui a réalisé de meilleurs bénéfices que prévu au premier trimestre, a demandé mercredi une application "rapide" du plan européen pour la sidérurgie avant de réenvisager d'investir dans la décarbonation en Europe -notamment à Dunkerque en France, l'un des plus importants hauts fourneaux du Vieux Continent.

"Une mise en oeuvre rapide du plan est maintenant requise pour s'assurer que la fabrication d'acier en Europe redevient compétitive et puisse continuer d'investir pour son avenir", a déclaré le directeur général du groupe Aditya Mittal, cité dans le communiqué de résultats trimestriels du deuxième sidérurgiste mondial.

Fin 2024, ArcelorMittal avait suspendu son projet d'investissement massif -à hauteur de 1,8 milliard d'euros- dans la décarbonation de ses hauts fourneaux de Dunkerque, en arguant de la non compétitivité de l'acier produit en Europe.

Le sidérurgiste a aussi annoncé ces dernières semaines un plan d'économies pour tenter de regagner sa compétitivité en Europe avec le transfert d'activités support vers l'Inde portant sur 1.400 postes.

En France, le plan ne vise pas uniquement les fonctions support. Il porte aussi sur des emplois de production, avec quelque 600 suppressions de postes prévues dénoncées par les syndicats.

ArcelorMittal n'est pas seul dans son cas. Les difficultés des sidérurgistes implantés en Europe ont poussé la Commission européenne à se mobiliser et à annoncer il y a quelques semaines un plan d'action pour soutenir la production et protéger le commerce de l'acier.

- "défenses commerciales" -

L'acier européen est pris en étau entre la baisse de la consommation sur le Vieux Continent, la concurrence jugée déloyale d'acier à bas prix venu de Chine notamment, les prix de l'énergie élevés en Europe et, désormais, les nouvelles taxes douanières.

Avant d'investir dans de coûteuses installations à Dunkerque pour éliminer ou réduire ses émissions de CO2 et garantir la pérennité à long terme du site, ArcelorMittal demande un "accès à une énergie compétitive", un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF) "efficace" et des "défenses commerciales" face aux importations à bas coûts afin d'assurer "la compétitivité" d'un futur acier européen bas carbone.

Ailleurs en Europe, il souligne que ses projets de décarbonation "progressent" en Espagne, avec l'installation d'un four à arc électrique à Gijon et l'extension du site de Sestao.

"Il est clair qu'il y a désormais une bonne compréhension en Europe des défis auxquels l'industrie de l'acier fait face", a salué le directeur financier du groupe Genuino Christino lors d'une réunion d'analystes.

Le groupe a estimé que les perspectives en Europe sont "meilleures qu'il y a deux mois" et souligné l'impact du fonds d'infrastructure allemand récemment annoncé qui devrait "soutenir la demande" en Europe.

Mais, interrogé sur l'éventualité pour ArcelorMittal de quitter à l'avenir l'Europe aux coûts de production trop élevés au profit de l'Inde ou l'Amérique Latine, M. Genuino n'a pas démenti, se bornant à dire qu'il est trop "tôt" pour évoquer ce sujet, qui constitue la principale crainte des syndicats européens de salariés du groupe.

Sur les conséquences du conflit commercial déclenché par l'annonce de surtaxes douanières aux Etats-Unis, M. Mittal s'est voulu rassurant à court terme, soulignant que les usines du groupe étaient réparties dans la plupart des grandes régions du monde et que les exportations représentaient "une partie relativement modeste" de ses ventes.

Néanmoins "l'incertitude renouvelée sur le commerce mondial heurte la confiance dans le domaine des affaires et risque de causer de nouvelles perturbations économiques si rien n'est fait rapidement", a-t-il averti.

- "Marges robustes" -

Pour 2025, ArcelorMittal a confirmé que son enveloppe d'investissement pour ses projets de décarbonation s'élèverait "entre 4,5 et 5 milliards de dollars", sans détailler la ventilation par projet et par pays.

Dans ses "projets-clés" pour 2025, qui sont "en bonne voie", il cite l'agrandissement des activités de minerai de fer au Liberia, un four à arc électrique à Calvert aux Etats-Unis attendu au 2e trimestre, et le développement de ses activités sidérurgiques en Inde avec des acquisitions de terrains. Dunkerque n'est pas cité.

Au premier trimestre, le groupe a dégagé un bénéfice net de 805 millions de dollars, en retrait de 14% par rapport à celui du premier trimestre 2024, mais supérieur aux attentes des analystes.

Le consensus d'analystes réuni par Factset tablait sur un bénéfice net de 429 millions de dollars de janvier à mars, et celui de Bloomberg atteignait 505 millions de dollars, après un bénéfice de 938 millions de dollars au même trimestre en 2024, et une perte nette de 390 millions de dollars au quatrième trimestre 2024.

im/uh/rl