Apport modeste du numérique pour réduire l'empreinte carbone, selon l'Ademe

Les solutions numériques peuvent contribuer à une activité économique plus vertueuse pour l'environnement, mais leurs bénéfices restent modestes et incertains, selon une étude publiée jeudi par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).

Cette étude, baptisée IT4Green et réalisée à la demande du gouvernement, a analysé cinq cas d'usage: télétravail, externalisation de la gestion des pneus des transporteurs routiers, éclairage public, optimisation des lignes électriques à haute tension et usage d'outils numériques pour la fertilisation des sols agricoles.

Si le numérique apporte de réels bénéfices environnementaux dans chacun de ces cas, les auteurs mettent en garde contre deux risques qui peuvent les annuler.

Le premier est "l'augmentation de la dépendance aux ressources en métaux et minéraux", des matières premières critiques souvent importées pour la fabrication des outils numériques.

Ainsi, le télétravail affiche un bilan climatique globalement favorable en réduisant la consommation de carburant. Mais sa contribution, déjà modeste à la décarbonation du parc automobile (de 2 à 4%), ira en diminuant avec l'électrification des véhicules. De plus, il accroît le besoin de métaux pour fournir des équipements informatiques supplémentaires.

Les besoins "en capteurs et équipements électroniques" pour l'optimisation du transport de l'électricité sur les lignes à haute tension en réduiraient les gains déjà modestes.

Le second risque, difficile à mesurer, est l'"effet rebond". Il se produit quand une économie (de temps, de carburant, d'argent ou autre) obtenue grâce au numérique "incite les acteurs à consommer davantage", annulant donc le gain initial.

Ainsi, la délégation par les transporteurs de la gestion de leurs pneus à un manufacturier - par abonnement - permettrait d'éviter l'émission de "1,6 million de tonnes de CO? sur 13 ans". Mais une hausse d'"à peine 1% des kilomètres parcourus" suffirait à annuler ce gain.

Pour l'éclairage public, les solutions simples, dites "low tech", comme des LED dont l'intensité lumineuse diminue pendant la nuit, sont en réalité plus respectueuses de l'environnement que les systèmes connectés plus complexes (LED programmables à distance par des capteurs dans le luminaire), qui aboutissent souvent à créer de nouveaux services consommateurs d'énergie.

"Cette étude nous oblige à dépasser le mythe d'une unique solution numérique miracle", conclut Erwann Fangeat, l'un des auteurs de l'étude. "Se contenter de ce seul levier serait une erreur; l'urgence est d'investir dans des efforts de décarbonation et d'économies de ressources bien plus profonds", souligne-t-il.