"Cri de révolte" pour ses opposants, "campagne de dénigrement" pour sa majorité: potentielle candidate à la présidentielle, la maire PS de Paris Anne Hidalgo se voit rattrapée par le débat récurrent sur la propreté dans la capitale, qui n'avait pas empêché sa réélection en 2020.
Photos et vidéos de déchets à même la rue, traces d'urine, festin de rats, mobilier urbain rafistolé mais aussi plots en plastique et blocs de béton... Un modèle d'astroturfing, défini comme la simulation d'un mouvement spontané et populaire à des fins politiques?
Pour certains membres de l'exécutif parisien, cela ne fait pas de doute: le mot-dièse #saccageParis, qui s'est imposé depuis fin mars sur Twitter, est le fruit d'une "campagne orchestrée, organisée", insiste auprès de l'AFP l'adjoint aux espaces verts Christophe Najdovski.
Son collègue Frédéric Hocquard (tourisme) a dénoncé, tableau Twitter sur les publications et leur portée à l'appui, une "campagne de dénigrement de la droite et de l'extrême-droite revancharde".
- "Révolte" ou "complot"? -
Le #saccageParis a ainsi donné lieu à une bataille de chiffres pour savoir combien d'utilisateurs uniques étaient derrière les milliers de tweets. Mais pour l'opposante LR Nelly Garnier, "quand vous atteignez des niveaux de mobilisation très importants sur les réseaux sociaux, c'est que ce n'est pas maîtrisé".
L'ex-élu LR Pierre Liscia, connu pour ses vidéos dénonçant l'insalubrité ou des projets d'urbanisme dans certains quartiers de Paris, a nié dimanche être l'homme derrière le compte PanamePropre, lancé mi-février et à l'origine de #saccageParis.
Pour Nelly Garnier, "il ne faut pas chercher le complot: il y a eu un cri de révolte parti d'habitants, de collectifs de riverains, de citoyens anonymes désespérés de voir l'état de leur quartier et de la capitale".
Pour la porte-parole LR, trois exaspérations, "la propreté, le manque d'entretien de voirie et les aménagements très contestés" se rejoignent désormais, amplifiées "par les aménagements Covid", comme les blocs de béton protégeant les voies cyclistes, "qui ont rajouté quelque chose d'inesthétique à tout cela".
Le premier adjoint Emmanuel Grégoire, qui a lancé une consultation pour une nouvelle esthétique parisienne dont il présentera les résultats à la fin de l'année, a dû monter au créneau mardi pour défendre l'action de la maire. "Nous ne sommes réélus que depuis 9 mois, la mandature dure six ans et la crise Covid est passée par là", rappelle-t-il à l'AFP.
En matière de propreté, "il n'y a aucun déni de notre part" a affirmé l'élu socialiste, reconnaissant sur RTL que "la propreté a toujours été un problème à Paris". Mais pour autant, "on ne peut pas raisonnablement laisser à penser que le #saccageParis reflète la réalité de Paris", a-t-il souligné.
- Un air de déjà-vu -
"Paris ne connaît pas plus de difficultés que de nombreuses autres villes françaises", dit encore l'édile en regrettant ce "bashing qui abîme l'image de notre ville: des photos reproduites ad nauseam, recyclées en permanence, parfois très anciennes ou liées à des problèmes qui ont été réglés dans la journée même par nos services".
La promesse d'Anne Hidalgo de doubler de 500 millions à 1 milliard d'euros le budget dédié à l'entretien et à la rénovation des rues tient toujours. Elle avait été faite lors de la campagne municipale de 2020 pendant laquelle la maire sortante avait déjà été attaquée sur ce terrain par tous ses adversaires... avant de sortir confortablement en tête au premier, puis au deuxième tour.
Ses détracteurs cherchent-ils cette fois à nuire à sa possible candidature en vue de la présidentielle? "Je ne sais pas mais ce que je sais, c'est que c'est un étonnant détournement des enjeux actuels", répond prudemment M. Grégoire.
C'est pour l'Hôtel de Ville l'occasion de renvoyer une image de fermeté face aux incivilités, en réclamant au législateur "de pouvoir augmenter les amendes", la contravention de 135 euros n'étant pour M. Grégoire "pas assez dissuasive" dans certains cas. Avec la future police municipale, "on aura beaucoup plus d'agents qui seront à même de pouvoir verbaliser", espère de son côté M. Najdovski.
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