Explorer un chantier naval, visiter un parc éolien offshore, découvrir le savoir-faire d'un producteur de vin, d'une verrerie, d'une confiserie... Les visites d'entreprises, petites et grandes, rencontrent en France un succès grandissant.
En ce début juillet, une trentaine de personnes embarquent à bord du car qui doit les mener jusqu'au site Airbus Atlantic de Montoir-de-Bretagne, tout près de Saint-Nazaire.
Au micro, la guide prévient d'emblée: interdiction de prendre des photos, secret industriel oblige.
Dans un atelier traversé de passerelles blanches et turquoises, derrière un marquage au sol fluorescent, le petit groupe longe une succession de têtes d'avion en cours d'assemblage.
Parmi les visiteurs en short et casquette, des familles avec enfants, des retraités, une mère et sa fille qui envisage une carrière dans l'aéronautique, un couple belge en vacances sur la côte, des étudiants...
"Cela m'intéresse de savoir comment sont fabriqués les avions, découvrir les métiers. C'est l'occasion d'entrer là où on ne va jamais", explique Maël Guilhermet, 21 ans, étudiant en vacances dans la région.
Les visites d'entreprises ont attiré 22 millions d'amateurs en 2024, 30% de plus qu'il y a cinq ans, selon les chiffres publiés début juillet par Entreprise et Découverte, association nationale du secteur. 4.000 entreprises ont ouvert leurs portes au public, contre 2.000 en 2019.
- Made in France -
A Saint-Nazaire, les Chantiers de l'Atlantique ont chaque jour jusqu'à sept créneaux de visite. La billeterie de l'office de tourisme compte 21 euros par adulte, la moitié pour les 7-17 ans, même prix que pour Airbus.
Les cars de visiteurs sillonnent les 110 hectares du chantier, longent portiques, grues et paquebot en cours d'assemblage, croisant en chemin des salariés à vélo, en bleu de travail. Au programme, une plongée dans l'univers de la construction navale, et des escales au sein d'un atelier de soudure et d'une cale sèche.
"Il y a un public demandeur, des locaux mais aussi des vacanciers français, parfois étrangers, curieux du made in France (...) C'est aussi un levier important pour les entreprises, qui communiquent sur leurs formations, sur les carrières possibles. C'est un cercle vertueux", affirme Pierre Sabouraud, directeur de l'office de tourisme Saint-Nazaire Renversante, qui organise les visites d'Airbus, des Chantiers de l'Atlantique, du port et récemment du parc éolien offshore.
Sur les brochures fournies en fin de visites, Airbus et les Chantiers de l'Atlantique l'écrivent en gros caractères: toutes deux recrutent.
"C'est une opportunité pour les entreprises de se faire connaître du public, des riverains, parfois des élus", souligne Cécile Pierre, déléguée générale d'Entreprise et Découverte.
Depuis 20 ans, "l'association, les entreprises, l'État, les territoires, ont travaillé pour faire naître une véritable filière, qui rencontre aujourd'hui un engouement sans précédent", ajoute-elle. En mai, l'association et le guide du Routard ont publié un nouvel ouvrage dédié, répertoriant plus de 450 adresses.
- Patrimoine -
Si c'est EDF qui a attiré le plus de visiteurs en 2024 (500.000 visites, tous sites confondus), la grande majorité des entreprises ouvertes au public sont des PME et TPE, selon l'association. Arrivent en seconde et troisième positions la verrerie de Biot (Alpes-Maritimes) et la confiserie des Hautes-Vosges.
A Saumur, dans le Maine-et-Loire, le fabricant de vin pétillant Veuve Amiot organise des visites de sa cave troglodyte, où il produit ses "fines bulles" depuis la fin du 19e siècle.
25.000 visiteurs arpentent chaque année les six kilomètres de couloirs souterrains creusés dans la roche.
"On en apprend plus sur la région, son patrimoine. Cela fait longtemps que nous achetons du vin ici, du Saumur, du crémant de Loire, on a eu envie de voir comment il était fabriqué", raconte Jean-Loup Simon, retraité de 66 ans. Les visiteurs déboursent 4 euros pour une visite guidée suivie d'une dégustation.
A Saint-Nazaire, parmi les vacanciers qui explorent le chantier naval, Valentin Gervit, délégué général du Medef dans les Deux-Sèvres, profite d'un séminaire pour admirer le modèle. Il espère convaincre davantage d'entreprises de participer aux journées du patrimoine économique qui auront lieu fin septembre dans son département.
"C'est inspirant: il y a clairement un public, les créneaux de visite sont pleins", remarque-t-il. "Pourquoi pas chez nous ?"
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