©Kateřina Rubášová via Pixabay
En bref

Présidentielle : des économistes veulent remettre les enjeux de demain au coeur de la campagne

Les grands choix économiques des années à venir vont rester largement absents de la campagne présidentielle, craignent des économistes, qui veulent enrichir et éclairer le débat, mais sans prendre parti pour un candidat ou pour un autre.

Jeudi, le Cercle des économistes, qui regroupe une centaine de membres, a adressé dans ce but aux prétendants à la présidence de la République 20 questions sur des sujets qu'ils estiment incontournables. Six d'entre eux ont présenté devant des journalistes leur point de vue personnel sur certaines de ces problématiques : Comment financer les énormes besoins en investissements dans la numérisation, la santé, la transition énergétique ? Que faire si l'inflation se maintient durablement à niveau élevé ? De quelle manière attirer plus d'immigrants qualifiés pour promouvoir l'innovation ? Comment augmenter l'emploi des jeunes et des seniors ?

"Nous allons avoir un énorme besoin d'investissement", constate Patrick Artus, directeur de la recherche et des études chez Natixis, qui chiffre les besoins de la transition énergétique à 4,2 % du produit intérieur brut (PIB), soit au moins 100 milliards d'euros par an pendant les 30 prochaines années. Mais pour moderniser notre économie, "nous ne produisons pas assez et nous importons trop", selon M. Artus, notamment en raison, selon lui, d'"un taux d'emploi qui est dix points de pourcentage plus bas" que celui de l'Allemagne ou des pays d'Europe du Nord. "Nous n'avons pas les moyens des investissements que nous devons faire", résume cet économiste, qui met en cause la part trop importante des retraites dans le PIB et des prix trop élevés de l'immobilier. Il demande aux candidats, au-delà du coût du financement de telle ou telle mesure, "un cadrage complet des finances publiques". Le logement est un problème pour "la jeunesse, qui a été la grande sacrifiée des deux dernières années" marquées par la pandémie, a souligné Jean-Hervé Lorenzi, fondateur du Cercle des économistes.

Attirer les talents

Nathalie Chusseau, professeure à l'université de Lille, a insisté sur la mauvaise insertion économique et sociale des jeunes qui "constitue un immense gâchis" et "représente un coût pour les finances publiques estimé à plus de 22 milliards d'euros". L'intégration sur le marché du travail des jeunes exclus permettrait d'augmenter le taux de croissance de 0,4 point de pourcentage, selon elle. Du côté des seniors, si leur taux d'emploi est en hausse, il reste toutefois "très inférieur à la moyenne européenne", regrette Mme Chusseau, en soulignant que l'employabilité dépend des compétences, donc de la formation initiale et tout au long de la vie.

Des compétences que la France rechigne plus que d'autres pays à aller chercher à l'étranger, déplore Emmanuelle Auriol, professeure à l'École d'économie de Toulouse et autrice d'une récente note du Conseil d'analyse économique sur le sujet: en France, "on compte les immigrés comme on compte les morts sur la route", ce qui rend le pays moins attractif pour les étrangers qualifiés qui pourraient y créer des entreprises et y déposer des brevets, dit-elle. La capacité à innover est en effet liée à celle d'attirer des immigrés talentueux, comme l'ont montré les succès des start-up américaine Moderna ou allemande BioNTech dans la course au vaccin contre le Covid-19.

Patrice Geoffron, qui dirige l'équipe énergie-climat de l'université de Paris-Dauphine, constate pour sa part "une très grande absence dans la campagne (électorale), en tout cas à ce stade", des problématiques liées à l'environnement. Pourtant, à la suite des engagements européens de réduction des émissions de gaz à effet de serre, "on a devant nous une décennie d'accélération de révolutions et sans doute d'instabilité, qui ne transparaît pas" dans les discours des candidats au-delà du débat sur la place du nucléaire, regrette-t-il.

La transition écologique devrait aussi contribuer à soutenir l'inflation sur le long terme. Aussi le président du Cercle des économistes Hippolyte d'Albis appelle-t-il les candidats à se demander "ce qu'on pourrait faire si elle devenait forte et durable". La réponse dépend aussi de la nature de la hausse des prix. "Si l'inflation est portée par les produits alimentaires, elle pénalisera d'autant plus les ménages les plus modestes" qui y consacrent une plus grande partie de leur budget, alors que la hausse des prix de l'énergie "pénalisera plus la classe moyenne".

Avec AFP. 

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