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INFO PARTENAIRE

Hera : « la rareté de l’eau est l’un des visages de l’épuisement des ressources et nos territoires ne font pas exception »

Hera est aujourd’hui la plus grande société italienne multi-services, engagée principalement dans les secteurs de l’environnement (collecte et traitement des déchets), de l’énergie (distribution et vente d’électricité et de gaz) et de l’eau (aqueduc, assainissement et purification). Le groupe répond quotidiennement aux besoins de 4,4 millions de citoyens de plus de 350 municipalités du nord-est de l'Italie, et a connu une croissance constante sur ses trois activités principales depuis sa création, en 2002. Interview croisée de Stefano Venier, PDG d'Hera, et Léa Dunand Chatellet, Directrice de l’Investissement Responsable de DNCA Finance.

 

Stéfano Venier, PDG d'Hera

 

 

 

En quelques mots, comment se structure la stratégie durable du groupe ?

La RSE a toujours joué un rôle clé dans la stratégie d’Hera depuis sa création, il y a 17 ans. C’est pourquoi nous avons progressivement intégré les indicateurs de performance clés du développement durable dans nos systèmes de planification et de contrôle, ainsi que dans la rémunération variable des cadres supérieurs (...).

En 2016, nous avons effectué une analyse approfondie pour déterminer à quels Objectifs des Nations Unies (ODD) Hera contribue le plus par le biais de ses activités principales. Après cet examen, 11 ODD sur 17 ont été identifiés et inclus dans notre nouvelle approche de création de valeur partagée (CSV), six d'entre eux représentant un enjeu principal. Pour Hera, la CSV est ainsi le résultat de toutes les activités commerciales qui génèrent des marges opérationnelles et qui répondent aux "appels à l'action" de l'ONU.

L'approche CSV s'est révélée très efficace à la fois comme mesure de suivi et comme catalyseur d'engagement : la possibilité de mesurer et de rendre compte de notre contribution aux objectifs de durabilité et aux besoins du territoire est un outil puissant pour orienter à la fois nos actions quotidiennes et notre planification à moyen et long terme, pour inspirer nos employés et impliquer les parties prenantes dans notre stratégie.

En 2018, notre EBITDA «valeur partagée» s’élevait ainsi à 375 millions d'euros, soit 36 % de l’EBITDA total. Ces résultats sont dus à la contribution de nos activités de base comme l'utilisation efficace des ressources (représentant 260,6 millions d'euros) et l'utilisation intelligente de l'énergie (66,9 millions d'euros). Concernant cette dernière, 100% de l'électricité utilisée dans nos propres usines et vendue au segment de clientèle «famille» provenait exclusivement de sources renouvelables, la consommation d'énergie a été réduite de 4,4 %, l'empreinte carbone de 16 % et les services d'efficacité énergétique ont concerné 15 % de la clientèle, avec une économie totale de 8800 tonnes d'équivalent pétrole. En ce qui concerne l'utilisation efficace des ressources, seulement 4,5 % des déchets urbains ont atterri dans des décharges, tandis que la collecte des déchets triés représentait 62,5 % du total, avec plus de 90 % recyclés. Le taux d'emballages recyclés a dépassé 70 % et 150 000 tonnes de CO2 ont été économisées grâce aux plus de 80 000 tonnes de plastique recyclées par la filiale Aliplast. 

Vous portez également une attention toute particulière à la thématique de l’eau...

En 2019, les humains ont utilisé le budget annuel en ressources naturelles de la planète en seulement 7 mois. Il y a 20 ans, ce budget était suffisant pour couvrir la consommation de 9 mois. La rareté de l’eau est l’un des visages de cet épuisement des ressources et nos territoires ne font pas exception.

Nous desservons une zone étendue où les activités industrielles, le tourisme, les grandes villes sont concentrées et nous devons faire face à une forte consommation d'eau de nos clients, encore plus élevée en saison estivale où la probabilité de sécheresse est plus grande. Inutile de dire que le changement climatique affecte le système d'eau en termes de rareté et d'abondance : les tempêtes fortes et concentrées que nous avons connues ces dernières années ont mis à mal le fonctionnement efficace de nos systèmes d'assainissement. C'est le défi auquel nous devons faire face aujourd'hui et à l'avenir : nous voulons garantir la continuité des activités et fournir à nos clients une eau de qualité en toute saison, ainsi qu'un système d'assainissement et de traitement entièrement opérationnel, malgré des conditions météorologiques critiques qui peuvent se produire à tout moment. Cet enjeu nécessite une stratégie globale avec une perspective à long terme, afin de parvenir à un système d'eau régénératif et résilient.

Au cours des quatre prochaines années, nous investirons ainsi environ 420 millions d’euros dans les infrastructures afin d’accroître la fiabilité de l’ensemble de l’approvisionnement et la résilience globale des systèmes (…) Nous pourrons ainsi garantir une intervention «ponctuelle» sur les réseaux et réagir aux intempéries. De plus, une optimisation continue des opérations et des pressions du réseau se traduira par un cycle de l'eau plus efficace et par un moindre besoin d'entretien du réseau.

(Mais) les investissements ne sont qu’une face de la médaille : pour résoudre le problème de la rareté de l’eau, il est également nécessaire de travailler sur sa demande, de réduire l'empreinte hydrique et d'augmenter la «réutilisation» de l'eau purifiée. Sur le premier point, nous avons décidé d’évoluer dans trois directions :  fixer un objectif de réduction de 30 % de l'empreinte hydrique du groupe à l'horizon 2035 (10 % à l'horizon 2022), fournir un accompagnement dans le même but aux entreprises et aux communes et fournir aux clients des informations et des données de référence, qu'ils peuvent utiliser pour potentiellement réduire leur consommation d'eau. Nous appliquerons avec succès des principes d'économie comportementale pour « pousser » nos clients vers de nouveaux modes de consommation, comme nous l'avons fait avec la clientèle énergétique.

Sur le second point, à savoir la question de la réutilisation, nous travaillons avec les parties prenantes pour identifier de nouvelles opportunités dans le but d'utiliser près de 15 % de nos eaux purifiées et d'alimenter nos procédés industriels. D'ici 2035, nous souhaitons également améliorer et équilibrer les débits agricoles ou urbains dans les zones environnantes de nos usines et nous sommes fiers de dire que les premiers volumes ont été réutilisés près de Bologne cette année. 

Quels sont vos objectifs pour les prochaines années ?

Nos engagements futurs visent un EBITDA Valeur partagée représentant environ 40 % de l'EBITDA 2022 (1185 M €), soit près de 470 M €. Cela sous-entend des objectifs ambitieux en matière de décarbonation (-25 %), d’efficacité énergétique (-6 %), d’empreinte eau (-10 %), de recyclage (> 70 %), ou de plastique recyclé (100 kt). Afin d'atteindre cet objectif, Hera est prêt à déployer un plan d'investissement d'environ 3,1 milliards d'euros (2019-2023), dont près d'1 milliard d'euros directement liés à la CSV. Plu- sieurs projets sont à l’origine de ce développement et l’innovation jouera un rôle clé dans la réalisation de ces objectifs ambitieux. J'y crois fortement.

 

 

 

 

Léa Dunand Chatellet, Directrice de l’Investissement Responsable de DNCA Finance

 

 

 

Pourquoi détenir ce groupe dans vos portefeuilles ISR ?

Notre opinion positive concernant le groupe Hera se base sur un fort leadership tant sur les questions de responsabilité que de transition. Hera est très bien positionnée sur les enjeux de transition écologique et plus particulièrement sur le traitement de l’eau. Le groupe estime d’ailleurs que 33 % de son EBITDA provient d'activités qui contribuent directement ou indirectement aux Objectifs du Développement Durable de l’ONU avec trois activités principales : incinération avec recyclage (EUR50.3m), recyclage des déchets (EUR59.5m) et traitement de l'eau (EUR93m). Par ailleurs, le groupe offre une production d'électricité à base d'énergies renouvelables qui représente 2 % de l'EBITDA. L'objectif est d'atteindre 40 % d'EBITDA avec ces activités d'ici 2021.

Plus globalement, comment considérez-vous la thématique de l'eau dans vos stratégies d'investissement ?

L'enjeu de l'eau pour les années à venir est simple : la ressource en eau consommable est limitée alors que la population mondiale et les besoins en eau ne cessent d'augmenter. Cependant, les problématiques liées à l’eau sont nombreuses et complexes. Par exemple, plus de 2 milliards de personnes n’ont toujours pas un accès satisfaisant à l’eau potable selon l’OMS. Mais les besoins en eau ne se limitent pas à l’accès en eau potable et à l’assainissement, bien que ceux-ci soient prioritaires et déjà problématiques. L’eau est utilisée pour se nourrir, se chauffer, se déplacer : 70 % des usages de l’eau concernent ainsi l’agriculture, 20 % la production industrielle et énergétique, et 10 % la consommation domestique. Enfin, l’interdépendance hydrologique n’est pas une notion abstraite. C’est le cas de 39 pays pour qui, au moins la moitié des ressources en eau, trouvent leur origine au-delà de leurs frontières. C’est dans ce contexte pluridimensionnel que la question de l’eau est traitée à travers nos investissements. Les principales solutions se trouvent chez les acteurs de l’énergie et du retraitement de l’eau. Dans nos stratégies ISR de la gamme DNCA INVEST BEYOND, deux fonds sont notamment investis dans la société HERA : DNCA INVEST BEYOND Semperosa et DNCA INVEST BEYOND Infrastructure & Transition.

 

 

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