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CHRONIQUE JURIDIQUE

Quelles alternatives à l'essence et au gazole d'après la loi ?

Face à la grogne d’une partie de la population relative à l’augmentation du prix du gasoil vue ce week-end avec les mobilisations des gilets jaunes, il convient de s’intéresser aux alternatives aux hydrocarbures prévues par la loi.

Depuis le début des années 2000, la France s’est engagée dans un processus de substitution des énergies fossiles au profit de biocarburants. Les gouvernements successifs ont usé de leviers tant punitifs qu’incitatifs. Dès la loi de finance pour 2005, l’article 32 du texte instaure la composante "énergies fossiles" de la Taxe Générale sur les Activités Polluantes pour les industries pétrolières. Le taux de prélèvement augmente chaque année mais baisse en fonction du taux d’incorporation de biocarburants. De manière similaire, l’État a ainsi mis en place une mesure incitative via une exonération partielle de la taxe intérieure de consommation. L’utilisation de biocarburants pour les pétroliers leur permet d’être exonérés proportionnellement à l’incorporation de biocarburant. L’incitation est donc claire pour les acteurs du carburant.

Le taux d’incorporation de biocarburants est légalement réglementé année par année et encouragé par l’Union européenne. D’ici 2020, la part de biocarburants dans les transports devra atteindre 7 %. Aujourd’hui, la France consomme au total moins de 5 % de biocarburants, d’où les mesures prises pour développer l’utilisation de ces derniers dans les prochaines années. La hausse des taxes décriée par les gilets jaunes constitue, indirectement, un moyen d’accélérer le processus visant à tendre vers cet objectif.         

Des mélanges avec des carburants fossiles

L’utilisation des biocarburants est conditionnée, pour le moment, à des mélanges avec des carburants fossiles classiques, autrement appelés biocarburants de première génération. Si l’État encourage la recherche afin de mettre en circulation la deuxième génération de biocarburant, plus autonome, il n’existe pas aujourd’hui de carburant alternatif, généralisé sur le marché. En 2006, la Loi d’Orientation Agricole avait autorisé l’utilisation d’huiles végétales pures transformées chimiquement pour les pêcheurs et les agriculteurs. Cependant, seuls les véhicules professionnels comme les tracteurs sont autorisés à utiliser ce type de biocarburant. Le reste des biocarburants sert à réduire la part d’énergie fossile utilisée sans pour autant la remplacer. L’inadaptation des véhicules à certains biocarburants ferait courir des risques de dysfonctionnement pouvant causer des accidents. Il n’est ainsi pas conseillé d’utiliser un biocarburant pur dans une voiture tout public.

La loi encadre la liste des biocarburants autorisés ainsi que l’utilisation qui en est faite. Il n’est donc pas possible de fabriquer soi-même son propre biocarburant de façon artisanale, sans autorisation. Le cadre légal mis en place prévoit deux types de biocarburants : l’essence et le gazole. Les produits à base d’éthanol sont commercialisés sur le marché. On en retrouve dans le sans-plomb, à hauteur de 5 % ou 10 % : le SP95, le SP98 et le SP95-E8. Si les deux premiers sont accessibles à la quasi-totalité des véhicules, deux ou quatre roues, le SP95-E8 n’est ouvert qu’aux voitures dites "Flex-Fuel" équipées d’un boitier E85. La récente homologation de ces boitiers fait monter en puissance ce type de biocarburant, quatre à cinq centimes moins chers que le sans-plomb au litre. Les biocarburants gazole tels le gazole B30 ou ED95 équipent les véhicules diesel adaptés. Ces alternatives sont également moins chères et disponibles dans les stations essence.

Le développement de ces biocarburants est cependant loin d’être terminé. Le Parlement a d’ailleurs voté un amendement dans la loi de finance, le 17 novembre, pour écarter l’huile de palme, auparavant utilisée, de la liste des biocarburants. Le cadre législatif n’est pas définitivement figé et l’état de la recherche ne permet pas la mise en vente de carburants 100 % alternatifs. En attendant cela, il faut se contenter de mettre dans nos véhicules des substituts mixtes à moitié composés d’essence ou de gazole, dont le prix risque encore d’augmenter.

Maître Arnaud Touati

Avocat associé - Barreaux de Paris et de Luxembourg

Et Farrah Mazouni

HASHTAG Avocats

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