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Environnement

Projet de loi énergie et climat : en pleine canicule, les esprits s'échauffent à l'Assemblée

Alors que la canicule s'installe, les débats sur le projet de loi énergie et climat s'annoncent musclés à l'Assemblée sur ce texte qui redonne "le cap d'une ambition forte" selon le gouvernement, mais déçoit oppositions et ONG, notamment sur les "passoires thermiques".

Porté par le ministre de la Transition écologique François de Rugy, le projet de loi, qui doit être examiné à partir de mercredi après-midi, prévoit d'atteindre la "neutralité carbone" à l'horizon 2050 et décrète l'"urgence écologique et climatique". Il décale aussi de 10 ans, de 2025 à 2035, la réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production électrique.

Quinquennat : un acte II "plus vert" ?

Un peu moins de 900 amendements sont au menu des députés d'ici la fin de la semaine pour cette première lecture, qui aurait dû démarrer mardi soir mais a été décalée en raison d'échanges prolongés sur le projet de loi concernant la collectivité européenne d'Alsace.

Alors que le gouvernement a annoncé un acte II du quinquennat plus vert, ce projet de loi est vu comme un test de ses ambitions écologiques. François de Rugy vante un rehaussement "drastique" des ambitions françaises en matière de neutralité carbone. Le pays devra diviser ses émissions de gaz à effet de serre au moins par six, et ce alors que l'épisode de canicule en cours est "une conséquence concrète de l'effet de serre", selon le ministre. Le texte prévoit aussi une baisse de 40 % de la consommation d'énergies fossiles d'ici 2030 et doit permettre de fermer les dernières centrales à charbon en 2022.

Un texte ambitieux ou une "petite loi" ?

Les oppositions sont plus que réservées sur ce que certains ont décrit comme une "petite loi". Même l'allié du MoDem se dit "assez frustré" et certains "marcheurs" veulent muscler le texte. La plupart des groupes, à l'instar des UDI et indépendants ou des élus Libertés et Territoires, notent que "si la volonté affichée est au rendez-vous, les moyens ne suivent pas".

Les Républicains, qui entendent notamment défendre "la préservation de l'excellence nucléaire française" et ne veulent pas voir la filière "démantelée", défendront d'emblée des motions de renvoi et de rejet du texte.

Les trois groupes de gauche - PS, PCF et LFI - sont également très critiques d'un texte "creux par rapport à un enjeu majeur" (PS) et avec des objectifs "généraux et généreux" mais sans les "outils" (PCF).

Les passoires thermiques, un sujet plus que polémique

Les associations environnementales craignent elles aussi que l'"urgence" inscrite par les députés en commission ne soit "déjà oubliée". Greenpeace, France Nature Environnement et encore Oxfam critiquent en particulier la trajectoire révisée sur le nucléaire et insistent fortement sur la réhabilitation énergétique des millions de bâtiments "passoires énergétiques" que compte la France. Et ce, alors que les bâtiments représentent 45 % de la consommation d'énergie et un quart des émissions.

L'ex-"marcheur" Matthieu Orphelin prédit une "grosse bataille" sur ce sujet et rappelle que l'interdiction de la location de ces "passoires" à compter de 2025 était "un engagement porté par Emmanuel Macron dans la campagne présidentielle". Il défendra des amendements en ce sens, comme la gauche et certains "marcheurs" dont Barbara Pompili - les MoDem comptant aussi faire des propositions.

Le gouvernement affiche, lui, sa volonté de lutter plus efficacement contre les "passoires", celles ayant les étiquettes "F" et "G", ce qui concerne 7,5 millions de logements en France. Mais il ne veut pas d'une interdiction pure et simple qui aurait "une dimension anxiogène" pour des personnes précaires qui pourraient penser qu'on va les empêcher d'accéder à un logement.

En commission, les députés ont prévu, à l'initiative notamment du rapporteur Anthony Cellier (LREM), une expérimentation à partir de 2021 lors de la vente d'une "passoire" : la consignation d'une part du montant de la vente pour financer des travaux de rénovation. Pour le gouvernement, l'idée est bienvenue mais la formule devra être retravaillée pour notamment renforcer sa sécurité juridique. Des "marcheurs" plaident aussi pour ne pas en rester à ce dispositif.

Avec AFP