"Territoire zéro chômeur": trois questions à Patrick Valentin, son directeur

Premier anniversaire pour les dix "territoires zéro chômeur" de France, l'heure d'un premier bilan avec Patrick Valentin, directeur bénévole de l'expérimentation et vice-président de l'association "Territoire zéro chômeur de longue durée" (TZCLD), présidée par l'ancien député PS Laurent Grandguillaume.

Question - Qu'est-ce qu'un "territoire zéro chômeur"?

Réponse - "Plusieurs millions de personnes sont privées d'emploi ou contraintes d'accepter des emplois précaires dans des conditions qui ne permettent pas une existence digne. Dans le même temps, trois constats permettent de penser qu'il est humainement et économiquement tout à fait possible de supprimer le chômage de longue durée à l'échelle des territoires: personne n'est inemployable et chacun a des compétences, ce n'est pas le travail qui manque, ce n'est pas l'argent non plus.

Ce constat fait, nous partons du principe qu'il est possible à l'échelle d'un territoire, sans surcoût pour la collectivité, de proposer à tout chômeur de longue durée - plus d'un an - qui le souhaite, un emploi à durée indéterminée et à temps choisi, rémunéré sur la base du Smic. Ceci, dans le cadre d'une entreprise à but non lucratif créée pour la circonstance, en développant et finançant des activités utiles et non concurrentes des emplois existants (...) Mais pour aboutir, ces projets doivent partir du terrain, après une très large concertation."

Q - Comment sont financées ces expérimentations?

R - "L'idée est simple. Il s'agit de rediriger les budgets publics issus des coûts de la privation d'emploi pour financer les emplois manquants en assurant de bonnes conditions de travail.

Ce financement repose sur trois tiers: un tiers comprend les anciennes allocations versées aux personnes privées d'emploi (type indemnités de chômage ou RSA), un tiers repose sur les recettes consécutives à l'activité de la nouvelle entreprise, et le dernier tiers provient des économies réalisées sur les coûts induits, directs ou indirects, par le chômage de longue durée, en terme de pauvreté et de santé notamment."

Q - Concrètement, où en est-on de cette expérience?

R - "Dix projets ont commencé à fonctionner courant 2017. Ils emploient environ 400 personnes à ce jour. Ils sont à des stades différents: les plus anciens, Pipriac (Ille-et-Vilaine), Mauléon (Deux Sèvres), et les plus récents en zone urbaine, à Lille, Paris, ou Villeurbanne. On a même des gens qui ont retrouvé du travail en dehors de ces entreprises "zéro chômeur" parce que ce projet leur a redonné confiance. Même la collectivité s'en ressent mieux. Des maires nous disent souvent avoir constaté une diminution des incivilités.

De janvier à mai, on lance l'étude en vue d'une deuxième phase d'expérimentation. Nous avons actuellement une centaine de candidatures (de territoires) et il y en a 20 ou 30 qui seront prêts d'ici un an ou deux.

L'avenir du projet passe par une transmission de territoire à territoire. On voit bien que certains commencent à s'y intéresser, il faut que ça continue à partir de la base. Si ça devenait une affaire prise en main par l'Etat, ça deviendrait un dispositif de plus.

Ce qu'on démontre, c'est que les gens sont capables de travailler et qu'on crée des emplois, avec un impact positif sur les personnes comme sur la collectivité.

Prochaine échéance: 25 janvier, journée nationale des travaux utiles, sous forme de portes ouvertes dans les dix territoires pour que les visiteurs puissent se rendre compte de ce que font ces 400 personnes employées."

Propos recueillis par Clarisse LUCAS

Poster un commentaire
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.
Déjà membre ? Je me connecte.
Je ne suis pas encore membre, Je crée mon compte.