Notre-Dame-des-Landes: le projet d'aéroport abandonné après des années de controverse

Après des années de controverse, l'exécutif a choisi mercredi d'abandonner le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, malgré des décisions de justice et une consultation locale favorables, au profit d'un réaménagement de l'actuel aéroport de Nantes.

"Les conditions ne sont pas réunies pour mener à bien le projet de Notre-Dame-des-Landes" qui est devenu "l'aéroport de la division", a jugé Edouard Philippe lors d'une déclaration à l'issue du Conseil des ministres.

S'il a, comme attendu, appelé les "squatteurs" dans la "zone de non-droit" de la "Zad" à quitter les lieux, le Premier ministre leur a finalement donné "jusqu'au printemps" pour partir "d'eux-mêmes". Dans l'immédiat, Edouard Philippe les a sommés de rendre les routes bloquées "à la libre circulation de tous", faute de quoi les forces de l'ordre "procéderont aux opérations nécessaires".

La maire PS de Nantes, Johanna Rolland, a parlé de "trahison" et de "déni de démocratie", tout comme son prédécesseur, l'ex-Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Le président socialiste du conseil départemental de Loire-Atlantique, Philippe Grosvalet, a dénoncé le premier "reniement de la parole" d'Emmanuel Macron, "car il avait dit qu'il ferait l'aéroport".

Malgré les multiples rejets des recours en justice des anti-aéroport, le soutien au projet d'une majorité des élus de Bretagne et des Pays-de-la-Loire, et une consultation locale favorable (55,17%) en Loire-Atlantique en juin 2016, l'exécutif a préféré lâcher "NDDL".

"Grande victoire des zadistes", a déploré le patron des sénateurs LR et ancien président des Pays de la Loire, Bruno Retailleau.

"Il n'y avait pas de bonne décision", s'est défendu le Premier ministre devant l'Assemblée nationale dans l'après-midi.

L'alternative retenue est d'aménager l'actuel aéroport Nantes-Atlantique, qui sera "modernisé" et doit voir sa piste prolongée, a indiqué le Premier ministre.

- Explosion de joie dans la Zad -

L'annonce de la décision a déclenché une explosion de joie dans la Zad, où une vingtaine d'occupants ont ouvert du champagne, entonné des chants et se sont tombés dans les bras, a constaté un photographe de l'AFP.

"C'est une immense joie pour tous ceux qui ont lutté contre le projet. Je pense aux anciens de la lutte qui sont partis", s'est réjoui Julien Durand, porte-parole de l'Acipa, principale association d'opposants.

Le mouvement anti-aéroport s'est engagé à rouvrir les accès à la Zad, tout en disant son "refus de toute expulsion" de ceux qui se sont installés illégalement sur place. Une "grande fête de l'abandon" est prévue sur place le 10 février.

Né dans les années 60, relancé en 2000, attribué à Vinci par appel d'offres en 2010, l'aéroport "du Grand Ouest" a traversé un demi-siècle pour finalement devenir le symbole des atermoiements du quinquennat Hollande et le conflit environnemental le plus emblématique du pays.

Malgré l'abandon, Edouard Philippe s'est engagé à mettre un terme à la "zone de non-droit" de la "Zad", cette vaste "zone d'aménagement différée" de 1.600 hectares, rebaptisée "zone à défendre" par les opposants.

"Les occupants sans titre seront expulsés s'ils ne partent pas d'eux-mêmes", a-t-il dit, même si les terres "retrouveront leur vocation agricole" et seront soit rendues aux agriculteurs expropriés ou cédées par l'Etat.

Pour ses partisans, le nouvel aéroport devait permettre d'assurer le développement attendu du trafic aérien depuis Nantes, une des villes françaises à la plus forte croissance, face à la saturation attendue de Nantes-Atlantique dans sa version actuelle.

"Il faudra gérer la déception des partisans de l'aéroport, c'est une désillusion pour eux c'est certain", reconnaît un parlementaire.

- Victoire pour Hulot -

Le Premier ministre, invité du 20 heures de TF1, a reçu les parlementaires de Loire-Atlantique en début d'après-midi à Matignon. L'un d'eux, le LREM Yves Daniel, a dit envisager de "renvoyer sa carte d'électeur" à son parti.

Politiquement, la décision marque aussi une victoire pour le ministre de l'Ecologie Nicolas Hulot, opposé de longue date à l'aéroport.

Pour ses opposants, Notre-Dame-des-Landes était devenu un de ces "grands projets inutiles", condamnant un beau bout de bocage au nom du développement d'un mode de transport contradictoire avec les objectifs de la France de réduire ses émissions de gaz à effet de serre.

L'abandon du projet soulève aussi la question de l'indemnisation prévue pour Vinci qui, selon le rapport remis à Edouard Philippe, pourrait aller jusqu'à 350 millions d'euros.

L'entreprise, qui exploite déjà Nantes-Atlantique, s'est contenté d'une brève réaction: "Comme nous l'avons toujours dit, aujourd'hui plus que jamais Vinci se tient à la disposition de l'Etat", a dit un porte-parole.

Quant à l'agrandissement de Nantes-Atlantique, il reste entouré d'incertitudes.

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